Du Thym A L’Ail

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Le mobilier date des années 70, la cuisine aussi.

On pourrait avoir un attachement à ce genre de restauration balnéaire d’une grande désuétude. Fabuleux: salle et terrasse sont bourrées comme un œuf. Enfin: comme une omelette, puisque c’est grand. Beaucoup de cheveux gris et violets pour clientèle, qui parlent un peu fort puisque parfois l’autre n’entend plus très bien. Un des quatre serveurs met 15 minutes à venir vers moi. Ils sont passablement excités, désagréables et un peu agressifs, mais je comprends. Sous prétexte d’être sur le port de Bandol et de laisser 50 centimes de pourboire, quelques clients les sifflent, exigent, adjudantisent sans complexe. Je paye, j’ai tous les droits. Une horreur.

Devant ce spectacle qui me fait un peu honte, j’ai appuyé les « s’il vous plait » et les « mercis ». Et puis vraiment, quel boucan! Le serveur me parle, je le fais répéter. Une vingtaine de moules-frites, une quinzaine d’entrées, des pâtes fraiches, une huitaine de poissons, des viandes. Du menu du jour, il ne reste que « beignets de calamars, frites et salade ». C’est vous dire mon excitation. Menu à 17€ affligeant. Alors carte, car les menus à 22€ et 29€ sont tout aussi aguichants que le petit frère, mais en plus chers. Plat direct comme ça vu le boucan, je partirais plus vite: « escalope de veau milanaise ». 200/220g, provenance France: ça doit être mieux. Trop fine mais de grande surface. Le problème vient plutôt des légumes avachis et multi-réchauffés, carottes et courgettes aux couleurs éteintes, qui portent toute la misère du monde sur leurs rondelles. Que dire des frites congelées… pas grasses. Mais pas bonnes non plus. « Mais les clients les mangent » me dit-on parfois. C’est que le client, il a faim et il mange ce qu’on lui donne et ce à quoi il a été habitué. Enfin bon. Un 11/20 charitable pour 21€ qui le sont moins à l’égard de ma CB.

Vu la dégaine pathétique du café gourmand que j’ai vu passer, je fuis intégralement mes responsabilités à tester le sucré: à 9€ la blague, c’est une honte ne serait-ce que visuellement. Les serveurs font la tronche aux clients mais ne manquent pas une occasion de se poiler la panse entres-eux, en petit comité au fond, planqués au niveau du comptoir. A pleines dents. Ah! Si on pouvait se passer des clients! Mais ça va être compliqué!