Face à la mer et Mauricette en escarpins Lou Boudin dans le sable, Saint-Mandrier en fond de toile. Ah ça. Le moins qu’on puisse dire, c’est que la table de Marie et Stéphane Guiribelli tranche avec la production touristique basique: ce n’est pas le rade de la rade! Etablissement soigné dans son entièreté de la tête aux pieds dans l’eau, la cuisine fuit la règle de la facilité balnéaire. C’est souvent ainsi quand un restaurateur fonctionne à l’orgueil. Plutôt arrêter le métier que de ne pas en être fier. On déplace les montagnes, avec un orgueil bien placé. Et aussi des clients, plein de clients qui viennent et qui reviennent. Qui s’infiltrent parfois ici jusqu’en en cuisine, alpaguant le chef Guiribelli, « Stéphane, tu me fais ce que tu veux aujourd’hui! ». Bref! Dans ce lieu de rêve, on y croise forcément la cuisine du poisson et ses à-côtés: daurade, Saint-Pierre et chapon frais grillé, daurade et loup en croute de sel, soupe de poisson maison, petite friture mixte, puntilla frits ail et persil, calamars à la plancha et le véritable aïoli provençal! Deux années de suite je me suis régalé ici avec les linguines aux palourdes. Un monument de la cuisine transalpine collé à la carte du VOG depuis le début. Je file vers la 3ème fois mais Mauricette me fixe avec ses gros yeux globuleux à cause de ses lunettes en cul de bouteille, comme un lapin pris dans les phares: « pas question, le reste aussi est très bon ».
J’ai pas moufté et embrayé sur « filet de Saint-Pierre en pomme d’amour ». Une « recette d’antan », de grand-mère. Plat en terre cuite sorti du four, pomme de terre, poireau, tomate confit dans l’huile d’olive, le poisson dessus. Idée rustique piquée dans un bouquin de vieilles recettes, parfait. 15/20. La dame au chapeau vert confirme que le carnassier n’est pas oublié avec « épaule d’agneau confite 7h, jus corsé, écrasée de vitelotte ». Chair roulée et confite, deux divines tranches pour qui aime cette viande. Régal fondant à 15/20. Une touche de sucré pour clôturer avec le dessert du jour de la formule à 15€, oui m’sieur-dame. Un « baba à la framboise, sirop coriandre et crème fouettée ». Biscuit maison (rare) et sirop sans rhum fruité. 14,5/20. Produits choisis sur toute la ligne: du poisson au pain bio. Des préparations et des sauces bien faites dans une tradition sagement actualisée. Convaincant rapport qualité prix, d’autant que le service mené par Marie est pétillant et sérieux. Salle bien tenue, nappages et beaux verres. Clientèle bigarrée aux accents divers qui se mélangent au bruit des couverts. Emmenez des amis de Paris ou d’ailleurs: le souvenir s’ancrera dans leurs ciboulots. Et puis si vous êtes seul, il s’ancrera dans le vôtre.