Tout est assez parfait, sauf la cuisine.
C’est quand même un peu idiot d’afficher rigueur en salle, classicisme rassurant, nappage intégral, protocole avec ses codes du genre assumés et des vitres astiquées comme un sou neuf. Jeune femme bien à son affaire, jeune homme un peu plus crispé. Trois menus le midi, j’ai osé l’intermédiaire: ce fut mon erreur. Les habitués le savent bien, j’aurais dû mieux les regarder: ils choisissent le menu à 17€. 29,50€ mon menu avec une « crème de Butternut au mélange forestier doré ». Ça fait envie hein? Ben ouai. Moi aussi je suis tombé dans le panneau. Mais heureusement, pas dans la soupe… Une grande assiette creuse avec le butternut brut de décoffrage, comme une purée à l’eau. Purée brûlante. Me suis flingué la langue, j’ai tout recraché! Deux miracles: absence de cloque et personne ne m’a vu! Enfin je crois! Comment peut-on servir un plat aussi dangereux? Les bouts de champignons sont mous comme du décongelé micro-ondé. Autrement dit, le « mélange forestier doré » est en toc. Trois pétales de roses pour faire classe. 8/20. Puis « pavé de veau au myrtilles et son lasagne de légume ». Ce plat signe un véritable amateurisme en cuisine.
Quoique le tic poudre orange sur le tour de l’assiette valide le côté laborieux, la présentation fait un effort. Viande correcte à la cuisson juste: honorable mes petits lapins. Dessous, épaisse multicouche de lasagnes (4 ou 5) avec si peu de légume entre-elles qu’on dirait du coulis. Sur l’ensemble, une flaque de sauce terne en bouche et peu aguichante, comme un yaourt à la myrtille étalé. Trois pétales de roses pour faire classe. 11/20. Le meilleur moment du repas est sans le moindre doute l’assiette de « fromages affinés par Mme Déal (MOF) ». Ils sont trois pas bien lourd mais à température, excellents. L’excellent pain en ajoute au plaisir. Comment flinguer une bonne idée de dessert? La « terrine de fruits d’automne en gelée de vanille ». Deux tranches. En coupe, la moitié n’est que gélatine. L’autre moitié, des cubes de fruits en brunoise, pomme, poire et des scoubidoubidou, ouah. Avec peau, pouah. Pour que l’histoire retienne ce dessert, l’ensemble trempe dans une mare de crème anglaise. Perdu pour perdu, le cuisinier a crânement joué son va-tout. Vous allez rire: un pétale de rose pour faire classe! 8/20. Il est quand même important de noter que les produits sont pour la plupart frais et cuisinés « maison ». Tout autant de rappeler que cette exigence esseulée est très insuffisante pour décréter qu’une table est bonne.