On est très loin du style free-style des essayistes de la sauce et autres torturés de la recette compliquée, c’est moi qui ai la plus grosse. Avoir le nombril en étendard comme un gyrophare n’est pas vraiment le genre de Eric Ruault, le taulier. Aussi romantique qu’un trader au « London Stock Exchange », ce cuisinier émérite sait très bien que si on se bouscule certains soirs dans sa croquignolette boutique du Mourillon, c’est par strict intérêt gourmand et non parce qu’il est « sympathique ». Un personnage, Eric Ruault. Il aime tout le monde, c’est-à-dire personne. Et puis surtout, il vous dorlote la gourmandise comme personne. Avec des plats simples qui vous flattent le pif: foie gras maison, salade ribouldingue, salade levrette, risotto Périgord, ris de veau façon branleur, andouillette à la lyonnaise, ribs de porc, magret de canard, côte de bœuf et une armada de hamburgers qui donnent envie de visiter Nouillorque! Bref! Autant vous dire que votre copine végétarienne qui cherche les assiettes de jus de concombre servi au microscope sur un petit pois à l’eau d’Evian devra changer de trottoir. Repas avec l’éternelle Mauricette qui malgré son physique de Marie-Antoinette rafistolée préfère cent fois l’ambiance bruyante de potes devant des litrons de rouge que l’atmosphère éthérée d’un club de bridge et l’odeur du Earl Grey.
Pour moi, le dodu « pavé de bœuf façon Hanoï » coriandre, miel, soja. C’est marrant que je vous cause d’emblée d’une recette plutôt fine et délicate. Bon. Faut quand même que l’assiette déborde. Comme si le chef disait: « j’aime bien l’ordre, mais le désordre aussi »! Frites fraiches épluchées ici-même! 14,5/20. La dame au chapeau vert chante du I Muvrini avec l’accent yankee: elle a pris le « Hamburger corse »! Oignons, tomates confites, emmental, figatelli, poivrons et brousse. 220 grammes de viande, vas-y coco, tape dedans, c’est fait pour! Si tu le fais pas, d’autres prendront ta place! A noter l’excellent pain fait par un boulanger du quartier! 15/20 pour un hamburger! Du jamais vu! 13/20 pour le « café gourmand » se laisse faire, sans tremblement. Le sucré n’est pas le registre préféré du chef! Préférez le fromage, ça doit se trouver dans le coin si vous demandez gentiment. Service slalom et bras en l’air entre les clients au coude à coude, déco anarcho-cinématographo-rigolote. Quand la restauration est moins bête que d’ordinaire, rieuse et avec pour ambition de nous faire sentir le présent… ça fait un bien fou!