L’Arbousier

Les beaux murs impressionnent un peu, mais il ne s’agit pas de cette gastronomie ampoulée et grave selon les codes élaborés par les guides sérieux. Juste une cuisine bonheur appuyée sur deux fondamentaux oubliés par les professionnels de la profession: produits top qualité, convivialité rare et non feinte. Le quinqua du pays Jean Abbinanti a toujours cuisiné pour la famille et les amis, et les amis de ses amis. D’une famille d’artistes polyvalents (lui-même est musicien de jazz), il saisira vite que dans la vie, tout était possible. Et comme dans ses attributions professionnelles précédentes, il raffolait du bon restaurant… il s’est construit en écoutant (musique) et observant (peinture). Un attachement particulier à la table de Régis Marcon (43), au travail des Meilleur père et fils à La Bouitte (73) et quelques autres où le médiocre est banni des lieux. L’idée d’avoir son propre restaurant n’était donc pas saugrenue: vous y êtes! Mais moi avant! Bref! L’ardoise: 3 entrées, 3 plats, 3 desserts. Le marché, la saison. Pain de boulanger (moulin de Payou), viande de boucher (boucherie de Fontsainte), fromages de la ferme Magnaldi (la Cadière). La cuisine traditionnelle « minute » raconte des histoires, parle de la terre et des gens dessus. Tiens. Les moules farcies façon Lulu! Gnocchi à la crème truffée! Gambas, asperges vertes de Cavaillon et pointes de jus réduit. Filet de loup, jus de veau corsé.

Joues de lotte, écume de lard et lentilles du Puy… et un « émincé de magret de canard, poêlée de légumes primeurs, jus réduit ». Un festival de légumes chouchoutés aux belles couleurs, petits pois ou fèves, artichauts violets, carotte et navet de pays (maraicher Pierre Zoubkoff à Saint-Cyr). Le chef est taquin. « émincé de magret » qu’il dit! Ouaha! Un magret entier oui! Impeccablement strié, dos croustillant et chair rosée! Jus court à damner! 15,5/20. La dame au chapeau vert tâte la formule du midi avec le « pavé de saumon, crème citronnée ». 15/20. Deux plats, deux cuissons précises. La surprise vient (aussi) des desserts! Mauricette s’entiche d’un brillant « sablé croustillant, mousse praliné noisette et chantilly au chocolat » qu’on ne rencontre que bien rarement dans les « restaurants traditionnels ». Une perle circulaire gourmande, pointillisme joueur caramel-chocolat: 15,5/20 à l’aise, 7€ seulement. A montrer aux « restaurateurs professionnels » escrocs côtiers qui refourguent sans états d’âme aux gogos du fondant au chocolat industriel congelé à 8€ ou 10€. Bref! L' »assiette gourmande » résume, plus de place pour écrire, juste la note: 15,5/20 et 8€. Probablement fidèle en amitié, Jean Abbinanti l’est moins avec les vignerons. Les flacons à prix réfléchis jouent à la vigne musicale. A une encablure de La Ciotat, un village avec une sacrée bonne table. Du genre qui donne envie de courir dans les champs pour sentir le thym et chaparder les amandes.