« La Table du Roy »: on pense illico à de la dorure clinquante, du faste empesé, des courbettes et assiettes sophistiquées amenées sur la musique de Lully. Je vous arrête, fausse route intégrale. Le personnel est à l’aise et prévenant malgré la surprenante affluence de ce samedi midi. On a tout vu avec Mauricette miro comme une taupe mais qui n’a jamais les yeux dans sa poche. Maggy et Mathias Pérès auraient pu ouvrir une simple brasserie cynique enfonceuse de portes ouvertes, une restauration faite pour s’enrichir, à l’ambition dégonflée qui rassure le banquier. Pfff. Mathias Pérès n’aime pas attendre le chaland derrière son tiroir-caisse. Faut qu’il aille dehors, à la lumière, sur les marchés au quotidien à serrer les mains des producteurs en cogitant sur sa prochaine carte, répondre aux interviews des journalistes. Le contraire du cuisinier renfermé sur lui-même. Formule du jour à 15,90€ des midis de semaine ou menu découverte à 49,90€: même rigueur, gout des choses bien faites, produits terribles. Redoutable menu à 31,90€. Avec « foie gras de canard mi-cuit « maison » et sa déclinaison aux pommes ». Compotée de gala, espuma de cidre, billes de fuji caramélisées, sorbet granny-smith, mesclun. Le talent tombe dru. Foie gras au naturel, classique impeccable. Et puis les nerveuses bricoles autour vous mettent la fourchette sur 380 Volts. 16/20.
La dame au chapeau vert file sur « St-Pierre rôti au pesto sur un lit de risotto aux girolles, fenouil et céleri, nuage de pleurotes ». Le poisson joue les seconds rôles à cause de l’exceptionnelle garniture, brunoise de légumes cuisinée comme un risotto d’influence Passard, le fameux célerisotto. 16/20. Entrée faussement sage: « carpaccio de taureau et déclinaison de champignons des bois en fines lamelles, panés, mesclun vinaigrette moutarde à l’ancienne ». Tout est dit, sinon la dominante « girolle » en tête de gondole. 15,5/20. « Porcelet confit de 24 heures, fricassée de champignons des bois et artichauts, mini-légumes, émulsion d’épinards, purée de cresson ». Viande fondante, se coupe avec un couteau à beurre! Mini-légumes croquants: carottes de toutes les couleurs, navets, choux romanesco, violet… le potager du Roy! 15,5/20. Autant le géantissime « fondant au chocolat « Grand Cru Valrhona », cœur coulant poire et son sorbet » est dans ce qu’on en attend (15,5/20), autant le « millefeuille aux deux chocolats, pommes caramélisées, fond de tarte spéculos » est recherché. Fruité-chocolaté, sucre discret. Chapeau bas: 16/20. Une cuisine signée aux bonnes idées gastro et bistro, dopée aux produits (extra) frais locaux. A 31,90€ un menu complet de cette qualité, faut reconnaitre que le rapport qualité prix ne fait pas dans la dentelle. Cave pointue. Que continue le plaisir! Musique! Il est où Lully?