Deux dames blondes, une petite en talons hauts avenante et rigolote scotchée devant son ordinateur, et une autre plus grande avec des lunettes, taciturne limite blasée. Elles nous attendaient dans une salle bien vide de samedi midi d’automne. Avant tout, félicitons d’emblée le travail du jeune cuisinier qui se dépatouille comme un beau diable. Pourtant avec Mauricette devant l’ardoise des propositions, on prendra peur! 8 entrées et 15 plats! En sus, des menus du ouic-end pas intéressants, je veux dire: non attirants. En lisant, je questionne la serveuse à lunette: « les frites sont faites ici? ». Elle me répond avec l’assurance d’un vendeur de foire que « oui, bien sûr, tout est maison ». Je choisis alors la « bavette sauce poivre »! L’habituellement banal morceau de viande est ici tressé de façon amusante, généreux et à la cuisson ajustée, mais avec bien peu de sauce. Un coin de salade avec des bricoles, et une pomme Darphin maison et les fameuses frites. Ce qui fait deux fois la patate dans l’assiette mais bon. Je vous le donne Emile: les fameuses frites, c’est du congelé! Vous savez, ces fameuses frites incurvées qu’on rencontre souvent au restaurant? Pas mauvaises en plus! En aucun cas il ne s’agit de frite fraiche. J’ai rien contre les frites congelées, mais le mensonge: beaucoup. Navrant. Et puis je ne sais pas vous mais moi, quand on me ment une fois, après j’écoute plus pareil, je suppose l’entourloupe à chaque mot. Bref! 18€ pour 14,5/20. La dame au chapeau vert apprécie son « pavé de biche sauce morilles » amené avec une sauce crémée sans outrance, une ou deux belles morilles, ce qui est mieux que 8 micro-pieds de morilles comme souvent. Quelques tagliatelles de légumes à l’huile d’olive, une pomme Darphin sous la viande et bien sûr, quelques frites… 22€ et 14,5/20. Nos desserts ont un sacré répondant, avec la fort agréable « mousse au chocolat » de Mauricette à 14,5/20 qu’elle compare immodestement à la sienne, et mon « tiramisu » de belle facture que je ne compare pas au mien car je ne sais pas faire le tiramisu. Il est subtil de l’Amareto, délicat dans son interprétation classique. 15/20 et 6€ chacun. En fin de repas, le jeune chef viendra nous voir à table, prendre des nouvelles, sympa comme tout, passionné de son boulot. Pas si fréquent. Naturellement et avec la modestie qui sied au bon cuisinier dénué de cynisme mais équipé de mains de travailleur usées comme des pieds de danseuse étoile, il confirme que les frites sont congelées. Il est honnête et ça me fait du bien.