Croquignolet restaurant comme recroquevillé sur lui-même, cherchant à se protéger de l’agitation urbaine, craintif comme un moineau un peu KO qui viendrait tout juste de se planter dans une vitre.
La coquette terrasse ne fait pas dans l’ostentation mais s’affirme. Oui, mignon, c’est exactement ça. Ça fait du bien à l’œil de tomber sur ce genre d’adresse qui respire la normalité intemporelle, comme une madeleine de Proust en forme de restaurant. Je sais pas si je suis clair. Enfin bon. J’ai déjeuné à l’intérieur. Le patron est sobre et bien peu expansif, cultivant l’art de la retenue avec adresse à moins qu’il ne s’agisse de sa nature profonde. Une carte avec 4 entrées et moins d’une dizaine de plats et 6 vrais desserts. Une affinité appuyée pour le foie gras est visible. Aussi, une formule du jour avec des options qui amèneront à une ambigüité tarifaire dans laquelle je me suis vautré, je vous exonère de mes explications.
J’entame avec « la marmite du « péché mignon »: dos de cabillaud cuit minute dans un bouillon aux saveurs méditerranéennes, tagliatelles de courgettes et parmesan. On sait tout… dressage circulaire particulièrement soigné dans la belle assiette creuse, généreux dans la portion, fringant dans les couleurs, délicat dans les cuissons. Le bouillon épicé pète la forme, bien. 18,90€ et 15/20. Je n’étais pas au bout de mes surprises! La « tartelette Belle-Hélène », ganache chocolat, poire pochée sur pâte sablée »: un étonnant dessert pâtissier. D’un point de vue gustatif c’est vraiment agréable, juste un peu de fébrilité dans la réalisation appliquée de cet exercice pas facile. 15/20 pour seulement 6,90€, ce qui vous changera des desserts industriels à 10€ vendus sans vergogne par les restaurateurs fainéants qui se moquent du monde.
Un repas sain et un couple sain avec une cuisinière modeste et autodidacte: on adore ça. Et puis à échanger après mon repas, le monsieur m’avoue après lecture et avec euphémisme « ne pas être convaincu du bien-fondé du Bouche à Oreille ». Un sous-entendu délicat qui signifie généralement que « le Bouche à Oreille » n’est pas gentil de parler des mauvais. C’est pas ma pomme qui va leur expliquer. On sait bien que crispés dans des certitudes qui les rassurent et le trop gros frisson possible de l’aventure, les gens entendent ce qu’ils veulent bien entendre. Et puis après tout, si par contre ça lui convient d’être référencé dans le bottin gourmand, le petit futé et le routard, alors la vie est belle! Cela dit et connaissant les rigoureuses méthodes de travail de ces guides, je m’autorise à pouffer. Et à évoquer l’existence du « Péché Mignon » en toute liberté de ton!